Pour passer le temps durant le confinement, j’ai ressorti de vieilles photos de mes disques durs et je me suis amusé à les retravailler dans Lightroom (et parfois aussi dans Photoshop, un logiciel que je n’utilisais pas à l’époque).  En faisant cet exercice, j’ai dû réinterpréter des images qui datent de 5 ou 6 ans.  Ce fut un beau voyage dans mes souvenirs!  Je me souviens de tous les détails de chaque photo: dans quelle condition s’est fait la prise de vue, ce que j’ai ressenti en prenant la photo, la conversation que j’ai eu avec la personne qu’on voit sur l’image.  C’est comme si j’avais fait la photo hier.  Aujourd’hui je veux vous parler de l’acte d’interpréter une photo, une démarche qui a complètement changée avec le numérique.

Les deux versions sont bonnes.

Interpréter une photo… un acte définitif?

Chaque photographe a sa définition de “interpréter une photo”.  Pour qu’on soit tous sur la même longueur d’onde, je vous donne la mienne:

 

Interpréter une photo est le travail technique fait à la prise de vue et/ou lors du post-traitement pour que l’image montre les émotions et le message que le photographe veut transmettre au public.

 

Si je veux que ma photo véhicule un sentiment de tension, de danger ou de stress, je pourrais faire un traitement “low-key”, utiliser des couleurs froides ou cadrer la photo en “dutch-tilt”.  Pour qu’un portrait transmettre une sensation de douceur et de sensualité, on peut utiliser des couleurs chaudes légèrement désaturées et faire un “soft-focus”.

Il ne suffit pas de photographier une jolie modèle dans une pose sensuelle pour que la photo fasse ressentir aux gens la sensualité.  Il faut traduire le niveau de sensualité qu’on souhaite faire vivre au public en éléments visuels.

Je préfère la version 2020.

Interpréter une photo… en argentique

Comme je disais dans l’introduction: l’acte d’interpréter une photo a complètement changé avec le numérique.  Je sais qu’il y en a plusieurs qui n’ont pas connu la photographie argentique.  Je vais donc expliquer comment on interprétait une photo à l’époque du film.

Lorsqu’on travaillait avec du film, les possibilités de corrections et de modifications après la prise de vue étaient quasi inexistantes.  La majeure partie du travail d’interpréter une photo se faisait à la prise de vue et les décisions qu’on prenait à ce moment étaient permanentes.

Le choix de la couleur ou du noir & blanc se faisait avant la prise de vue en choisissant le type de film qu’on mettait dans la caméra.  Si on voulait faire une photo high-key, on surexposait à la prise de vue et/ou on sur-développait le film lors du développement.  Pour avoir une image très contrastée en noir & blanc, on plaçait un filtre rouge #25 sur l’objectif de la caméra.  En bout de ligne, on obtenait un négatif permettant de faire un tirage noir & blanc assez contrasté et rien d’autre.  Si quelqu’un décide de refaire le tirage 20 ans plus tard, il va obtenir une image contrastée.

Meilleure maîtrise du post-traitement dans la version 2020.

Interpréter une photo

Avec le numérique, le travail d’interprétation se fait principalement en post-production.  Nous avons le loisir de choisir après la prise de vue si on veut avoir une image couleur ou noir & blanc, high-key ou low-key, à fort ou à faible contraste, etc.

En réinterprétant aujourd’hui des photos prises il y a 5 ou 6 ans, j’ai pu changer le message véhiculé par l’image.  En 2015 j’avais donné un rendu dramatique à la photo, maintenant je lui donne un ton plus léger.

 

Trouver la bonne interprétation d’une bonne photo

En ré-éditant mes vieilles photos, il y en a que – sans m’en rendre compte – j’ai repris exactement comme je les avais éditées il y a 5 ans.  Le contenu de l’image est tellement fort qu’une seule interprétation est possible.  Le sujet photographié dicte l’interprétation de la photo.  Ces photos « immuables » ont très souvent les particularités suivantes:

  • Une scène du quotidien avec une charge émotive très forte;
  • Les couleurs (ou l’absence de couleurs agréables à l’œil) dictent si le traitement est en noir & blanc ou en couleur;
  • L’émotion qu’on veut véhiculer peut seulement être montrée en utilisant une palette de couleurs chaudes ou froides

 

À l’opposé il y a des photos avec lesquelles j’ai fait un traitement complètement différent de ce que j’avais fait à l’époque.  Le sujet est plus « malléable ».  Ces photos présentent les traits suivants:

  • Un sujet qui ne peut être situé dans le temps ou dans l’espace;
  • Un sujet qui peut transmettre plus qu’une émotion;
  • La palette de couleurs de la photo peut facilement être altérée sans dénaturer le sujet représenté.

 

Le traitement noir & blanc donne à la photo un rendu intemporel de type documentaire.

Votre opinion sur le sujet…

Avec l’argentique le message et les émotions véhiculés par une photo étaient immuables.  Aujourd’hui avec le numérique il n’y a rien de définitif.  Le photographe peut à sa guise faire une relecture de son travail.  Comment, lorsqu’on est photographe, trouver la bonne interprétation de ses photos?  Celle qu’on veut transmettre aux générations futures?  Doit-on s’en tenir au premier traitement qu’on a fait à l’image?  Celui qu’on a fait en ressentant encore les émotions vécues lors de la prise de vue?  Doit-on revisiter son travail plus tard, à tête froide, pour en faire une interprétation plus objective?  Est-ce qu’il y a des photos qu’on peut se permettre de réinterpréter et d’autres non?  Il y a aussi la question du style: le style de certains photographes est plus « documentaire » alors que d’autres sont du genre « abstrait ».  Le photographe doit s’assurer de ne pas trahir son style lorsque vient le temps d’interpréter la photo.  À ce propos, je vous invite à lire mon article: « Développer son style en photographie ».

 

Je n’ai pas de réponse à mes questions.  En fait jamais je ne m’étais jamais questionné sur le sujet avant aujourd’hui.  Alors à vous photographes qui me lisez, je vous invite à donner votre point de vue sur le sujet dans les commentaires.

 

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